L’or pourrait revenir au-devant de la scène financière après être resté enfermé pendant plus de six ans dans un couloir graphique bien cadré entre 1050 USD et 1375 USD. Eloigné des radars des investisseurs pendant cette longue période, l’or a été délaissé au profit d’actifs plus risqués comme les actions. En effet, le S&P500 a connu un cycle haussier faste en se valorisant de 320% depuis 2008, placement longtemps incomparable à beaucoup d’autres et en particulier au métal doré. Ce dernier, on le sait, doit sa notoriété aux épisodes de stress sur les marchés financiers et aux phases de doute, où les investisseurs s’emploient à élargir leur diversification grâce aux valeurs dites refuges dont l’or en est le symbole. Le métal doré trouve plusieurs appuis pour suivre une trajectoire positive.
– A ce jour, si l’environnement demeure favorable au marché action, grâce à la volonté des banques centrales d’appliquer des politiques monétaires encore plus accommodantes, il n’en reste pas moins que les foyers d’inquiétudes s’intensifient sur toute la planète. Du manque de visibilité sur le Brexit en passant par un interminable conflit commercial sino-américain, le ralentissement des échanges internationaux pourrait influer négativement les perspectives, non seulement sur le terrain de la macroéconomie mais aussi sur celui de la microéconomie. A ce sujet, les prochaines publications d’activité du premier semestre témoigneront de la capacité des sociétés à relever ce défi.
– Les métaux précieux dépendent de la variable dollar. De ce fait, les deux valeurs ont tendance à évoluer de manière antagonique. Actuellement, les anticipations de baisses des taux qui influent négativement sur le billet vert galvanisent les cours du métal brillant.
– Historiquement, la valeur aurifère empreinte un parcours gagnant lors des phases d’inflation. Certes, la hausse des prix a disparu des pays occidentaux, poussée par la montée en puissance de la numérisation mais avec la dégradation « sans limite » des rendements obligataires, l’or bénéficie d’arbitrages favorables. Les taux d’intérêt réels négatifs, c’est à dire nets d’inflation constituent un atout pour un actif défensif comme l’or qui ne délivre, par définition, aucune rémunération.
– Le contexte actuel de tensions exacerbées entre Washington et Téhéran incite les observateurs à une grande prudence. Dans un tel environnement, les investisseurs arbitrent inévitablement en faveur de l’or, véritable « assurance » contre les risques géopolitiques.
– Elément plus structurel, les banques centrales poursuivent leurs achats physiques à un rythme soutenu afin de diversifier leurs réserves de changes. Cette composante de la demande mondiale se veut dynamique puisque 145 tonnes d’or ont été achetés sur le premier trimestre 2019, le meilleur score depuis six ans.
A chaque tentative d’extraction, l’effervescence se fait sentir chez les opérateurs car aucun ne voudrait manquer le rallye attendu depuis si longtemps. Les chartistes surveillent de près le comportement de l’or au contact de sa résistance des 1375 USD. Son franchissement inciterait à une forte remobilisation des intérêts acheteurs pour jouer le mouvement d’extension tel un « effet catapulte ».
L’ensemble des intervenants demeure sur le qui-vive pour se renforcer en valeur aurifère, ce qui pourrait redorer son image et en faire… la « romance » de l’été.
Patrick Rejaunier
Article tiré du magazine Strike 204 / Juillet Août 2019