Selon le FMI, la planète entière subit un ralentissement de sa croissance qui ne devrait pas dépasser les 3% sur 2019, un plus bas de dix ans. Cette estimation s’éloigne de la dernière statistique réalisée sur 2018 de 3.6%. L’Institut suprême prolonge son analyse en mettant en relief l’activité mondiale dont la progression en volume se monte seulement à 1%, la plus faible progression depuis 2012. Le ralentissement économique se synchronise donc sur toute la planète, les révisions baissières touchent non seulement les pays développés, tombés pour la majorité en récession industrielle, mais aussi sur les grands émergents. Parmi ces derniers pays, le retour à une phase de normalisation des taux de croissance se met en place, après des années de « super-croissance » comme la Chine, bien-sûr, mais aussi l’Inde. Les pays d’Amérique latine (le Brésil comme le Mexique), ayant des parcours économiques plus chaotiques, n’échappent pas non plus à une baisse des estimations pour 2020.
Du côté de l’Empire du Milieu, les indicateurs virent aussi au rouge. A l’image d’une production manufacturière décevante, l’ensemble des statistiques macroéconomiques publiées par Pékin permet de penser que la croissance de 6% du PIB allait être difficilement atteignable. La faiblesse de la demande intérieure se rajoute au conflit commercial, entraînant un ralentissement jamais vu depuis la publication officielle des statistiques en 1992.
La dégradation de l’environnement économique mondial trouve de la substance dans la guerre commerciale qui a vite glissé, par ailleurs, sur le terrain politique, générant ainsi une recrudescence des incertitudes voire une remontée du protectionnisme. Les récentes publications macroéconomiques font réapparaître les probabilités d’une fin de cycle aux Etats-Unis. En effet, l’indicateur manufacturier édité par l’ISM a déclenché la fureur des marchés financiers. Il y a un an, ce même indicateur caracolait sur des plus hauts à 61.3 contre une dernière référence publiée début octobre de 47.8, douze mois de glissade pour aboutir à la récession. Heureusement, les banques centrales gardent leur pouvoir accommodant pour redonner non pas de la visibilité mais des espoirs aux investisseurs même si le rendement des baisses de taux, en termes de croissance additionnelle, reste faible. Le débat qui va s’intensifier dans les semaines à venir, chez les observateurs, concernera le niveau de contagion de la récession industrielle sur l’activité des services qui subit également une érosion sans pour autant basculer sous le seuil fatidique de 50, barrière qui sépare l’expansion de la contraction.
La faiblesse du secteur de l’automobile se vérifie dans toutes les pays et plus particulièrement en Allemagne où les constructeurs subissent de plein fouet non seulement les contraintes commerciales mais aussi les nouvelles normes drastiques anti-pollution. La faiblesse de ce compartiment représente un indicateur pertinent sur la fragilité d’une économie et les récentes taxes douanières sur les produits européens pèseront de tout leur poids sur le secteur.
En parallèle, aux actions accommodantes des banques centrales, les économistes en appellent aux relances budgétaires notamment en Europe avec l’Allemagne et les Pays-Bas qui possèdent les marges de manœuvre nécessaires afin de repousser le terme de la récession car la question n’est pas de savoir si elle va bientôt se manifester, mais plutôt d’imaginer le moment où elle va se déclencher. Dans ce domaine, attention à ce que les prophéties auto-réalisatrices n’accélèrent pas sa mise en place.
Patrick Rejaunier
Strike Magazine N°207 – novembre 2019