L'analyse

La sous-performance du secteur énergie

Written by admin5430

Juin 2014, le prix du baril de pétrole (WTI) s’affiche à plus de 100 USD. Ce point restera le dernier pic graphique avant une baisse généralisée. Plusieurs facteurs ont participé à la transformation du marché des hydrocarbures, avec d’abord le ralentissement de l’économie chinoise qui a pris place depuis les années 2010. À l’époque Pékin étalait plus de 11 % de croissance (6 % aujourd’hui). En face d’une demande mondiale en décélération, le marché de l’or noir s’est structurellement dégradé car les opportunités de prix élevés ont actionné l’élasticité de l’offre. Les puits de pétrole de schiste retrouvaient de la rentabilité donc de l’activité et pouvaient ainsi renflouer l’offre globale.
À cette surproduction en provenance de l’extraction non conventionnelle, s’est rajouté le retour de l’Iran sur l’échiquier mondial des producteurs. Ces nouveaux paramètres ont inversé la trajectoire du pétrole, qui a perdu plus de 50 % sur les 6 dernières années.
Les nouvelles règles éthiques des investisseurs de plus en plus exigeants, examinant avec autant d’acuité les « Ebitda » ou les « bottom line » que les critères ISR, les ont vus se mettre progressivement en retrait du secteur, entraînant une forte décollecte sur les ETF dédiés. En bourse, le secteur souffre, à l’image de la sous-performance des valeurs « Big Oil » face aux indices de référence, comme le S&P500. À la lecture des performances relatives sur ces six dernières années, la tendance se veut limpide, Total, Chevron Exxon Mobil et Royal Dutsh Schell affichent des scores compris entre -20 et -30 % alors qu’en parallèle, le S&P500 gagne plus de 80 %. L’analyse des PER montre que l’expansion des multiples ne s’est pas produite dans le secteur. À 25 % de prime sur le secteur technologique par rapport à une moyenne de 10 ans, l’énergie oppose une décote de 3 %.
Le secteur de l’énergie est donc rentré dans une nouvelle donne environnementale complexe. Cela se concrétise par des pressions de plus en plus fortes sur les compagnies, en faveur d’une production plus verte.
« Nous sommes entrés dans la décennie de l’action dans les énergies renouvelables. Une période au cours de laquelle le système énergétique va se transformer à une vitesse inégalée », précise l’institution de l’énergie renouvelable (IRENA).
L’accélération des investissements dans les énergies renouvelables est notable avec plus d’un milliard de dollars sur les derniers mois pour le géant français des hydrocarbures qui intensifie sa diversification. Devenir le major de l’énergie responsable avec l’objectif de réaliser 20 % des revenus via la vente d’électricité faiblement émettrice de C02 sur les 20 prochaines années.
L’intention est louable. Dans ce contexte de pression intense en faveur de l’environnement et de la baisse du prix du pétrole, ces projets tombent à pic pour rappeler aux investisseurs que certains majors prennent le tournant vert en réduisant leur exposition à l’or noir.
L’énergie restera au coeur des enjeux économiques et politiques. Comme le rappelle son PDG, Patrick Pouyanné, la mission de Total est de donner l’accès à l’énergie pour tout le monde, le moins cher possible et d’une manière propre. Une vraie mission de service public mais peut-être au détriment de la profitabilité.

Strike 211, mars 2020

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