La chute du cours de l’Or noir ne cesse de faire les gros titres et s’impose comme l’une des tendances incontournables majeures de ces derniers mois pour les investisseurs. Les cours du Brent et du WTI ont été divisés par 2 depuis juin 2014 et vous êtes nombreux à vouloir profiter de cette tendance de marché. Alors avant d’investir voici quelques éléments à avoir en tête pour bien comprendre ce sous-jacent.
Que représente véritablement le cours du pétrole ?
Les médias ne le précisent que rarement mais il n’existe pas un cours unique du pétrole, comme il y en a par exemple pour une action sur une place de cotation donnée. Tout d’abord, il existe différents types de pétrole brut. Le pétrole étant prélevé dans diverses zones du monde, des différences de composition, de qualité et de coûts d’acheminement peuvent causer des écarts de prix potentiels. Pour pouvoir échanger du pétrole il faut donc définir un standard de qualité et un point de livraison. Les deux les plus connues s’appellent le Brent, provenant de la mer du Nord, et le West Texas Intermediate (WTI) des Etats-Unis.
A tout moment il existe un prix de marché pour le pétrole comme sur n’importe quel autre actif financier liquide. Ces cours ne sont cependant pas très pertinents pour de nombreux acteurs de l’industrie du pétrole. Les professionnels doivent pouvoir compter de manière ferme, en fonction de leurs besoins futurs, sur une quantité définie de pétrole à un prix fixe à une date donnée. Or les cours de marché et les quantités fluctuent à chaque instant en fonction de l’offre et la demande. Pour sécuriser un prix maintenant mais pour une date de livraison future, il peut donc être nécessaire pour les opérateurs de réaliser une opération de couverture pendant des semaines ou même des mois. En effet, si elles achetaient le pétrole au cours du marché (le cours spot), elles devraient recevoir et stocker cette marchandise pendant un certain temps, plus ou moins long. Quelques banques peuvent le faire pour certains métaux précieux mais l’opération est beaucoup plus onéreuse pour le pétrole.
Pétrole et contrats Futures
Pour pallier ce problème il existe les contrats à terme, appelés aussi les Futures. Avec ces contrats financiers vous avez la possibilité de détenir une position longue, c’est-à-dire une position acheteuse, à un prix fixé pour une échéance donnée. Cela donne donc le droit à l’investisseur de recevoir une quantité définie de pétrole brut à un prix donné pour une date convenue. L’avantage de ces contrats à terme pour les industriels est, bien entendu, de pouvoir planifier et figer le prix, la quantité et les délais de livraison.
Les spéculateurs actifs sur ce marché peuvent, quant à eux, couvrir leurs positions sans avoir à stocker du pétrole physique. En effet les contrats Futures peuvent être revendus à tout moment avant leur maturité et donc leur livraison.
Avec les produits financiers adossés au pétrole il existe un paramètre supplémentaire à prendre en compte. En effet ces produits peuvent avoir une durée de vie longue ou bien même être illimitée. Or il n’existe pas de contrats Futures ayant une durée de vie si longue, ces instruments ayant une durée de vie prédéfinie relativement courte. Il est alors d’usage d’utiliser le contrat à terme ayant l’échéance la plus proche pour effectuer ses transactions ou se couvrir. Peu avant la maturité du Future, il faut alors vendre le contrat en cours et investir dans le contrat suivant. Cette opération s’appelle un roulement, ou roll en anglais. Du fait de ce roll le sous-jacent change naturellement et, dans la plupart des cas, les deux contrats ne cotent pas exactement au même prix. Afin que le roll soit neutre pour le client et qu’il ne soit ni avantagé ni pénalisé par cette différence de cotation, les caractéristiques des produits financiers ayant pour sous-jacent un Future sont adaptées. De cette manière le roll n’a pas d’impact sur le prix du produit.
Contango et Backwardation
A l’approche de l’échéance d’un contrat Future, on constate que son cours a tendance à converger vers le prix de l’actif sous-jacent. Avant l’échéance si l’on observe les prix des Futures en fonction des maturités des contrats, on peut déterminer si la courbe est en déport ou en report.
Dans un scénario de déport, ou backwardation en anglais, la courbe des Futures va être descendante en fonction du temps. Cela signifie que les Futures ayant une maturité lointaine vont être moins onéreux que ceux ayant une échéance proche. Cette configuration de marché est généralement le signe d’un actif sous-jacent susceptible de se raréfier pour une demande immédiate ou qui bénéficie structurellement d’une demande forte par rapport à l’offre à court terme.
Dans un scénario de report, ou contango en anglais, la courbe des Futures va être ascendante en fonction du temps. Les contrats à échéances proches vont donc être moins chers que les ceux ayant des maturités plus lointaines. Cette situation est caractéristique des sous-jacents où les coûts de conservation et de stockage sont importants. C’est le cas notamment du pétrole (cf graphe).
FOCUS
Quelle corrélation existe-t-il entre la Brent et le WTI ?
Le Brent et le WTI côtent tous les deux en USD mais sur des places de cotation différentes : Londres pour le Brent, New York pour le WTI. Historiquement, le WTI était légèrement plus cher que le Brent car il était moins onéreux à raffiner et donc plus facile d’usage. Depuis quelques années la tendance s’est inversée et le Brent côte actuellement environ 10 USD de plus que le WTI. C’est notamment dû à l’utilisation croissante du pétrole de schiste par les Etats-Unis et d’un renchérissément de l’exploitation du WTI qui entraine une baisse de la demande. L’offre de WTI est donc plus importante que la demande d’où une baisse de ses cours plus marquée que sur le Brent. Enfin l’Arabie Saoudite joue un rôle certain dans la chute du WTI en augmentant ses quotas de production et en diminuant le prix de ses livraisons de Brent vers les Etats-Unis afin de maintenir sa part de marché.